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Le projet CARG’EAU accompagne la transition des exploitations vers des systèmes résilients et économes en eau

Le projet CARG’EAU, piloté par la Chambre régionale d’agriculture Centre-Val de Loire, a permis de capitaliser un grand nombre de références pour accompagner le plus grand nombre d’agriculteurs irrigants et non-irrigants, à la transition vers des systèmes économes en eau dans un contexte de changement climatique. Cet article nous livre les principaux résultats des enquêtes menées sur le sujet auprès de soixante-quatre exploitations.

Introduction

‎Le projet Carg’eau (Capitalisation et appropriation des références sur la gestion quantitative de l’eau) a pour objectif d’accompagner les agriculteurs dans la transition vers des pratiques agricoles plus économes en eau, en réponse au changement climatique.

Mené de 2021 à 2023, le projet a été financé par le ministère en charge de l’agriculture dans le cadre des financements au développement agricole. Mobilisant quinze chambres d’agriculture volontaires dans sept régions (figure 1), il a permis de réaliser des diagnostics auprès de soixante-quatre exploitations, dont quarante-neuf pratiquant l’irrigation.

Figure 1. Répartition des quinze chambres d’agriculture impliquées dans le projet CARG’EAU.

Les exploitations enquêtées ont été choisies pour être représentatives des régions du projet CARG’EAU (figure 2). Ces régions ont également la particularité de bénéficier de climats différents et de représenter cinq bassins hydrographiques français. Les exploitations enquêtées ont permis de couvrir les principaux types de filières agricoles en France métropolitaine (figure 1 et tableau 1).

Les enquêtes ont pour but de mieux comprendre les défis spécifiques rencontrés par les agriculteurs en matière de gestion de l’eau et d’évaluer les leviers existants pour faire face au manque d'eau et aux changements climatiques. Réalisées par les conseillers des chambres d’agriculture partenaires du projet, elles sont aussi l’occasion d’échanges avec les exploitants sur les pratiques existantes chez leurs collègues ou dans d’autres régions pour faire face aux mêmes problématiques.

Figure 2. Localisation des enquêtes CARG’EAU (source : Projet Carg’eau – IGN 2005 – février 2023.

Les résultats de ces enquêtes auprès des exploitations pratiquant l’irrigation révèlent plusieurs tendances significatives. Les sources d'eau utilisées pour l'irrigation varient selon les régions, avec une prédominance des prélèvements dans les nappes souterraines (+ 50 %) dans les régions du centre Val de Loire, en Alsace et dans une moindre mesure dans les Hauts de France. Les surfaces irriguées représentent en moyenne 39 % des exploitations enquêtées, avec une part plus importante dans les cultures pérennes comme l'arboriculture et la viticulture.

Les exploitations utilisent une grande diversité de matériels d'irrigation, adaptés à leurs besoins spécifiques, avec une prédominance des canons sur enrouleurs (44 %) suivis par le goutte à goutte et les systèmes de micro-irrigation. Pour le pilotage de l’irrigation, différentes méthodes et outils d’aide à la décision (OAD) sont utilisés : OAD d’évaluation de la réserve utile du sol de type Netirrig ou OAD de mesure « au champ » de types sondes tensiométriques ou capacitives. Bien que de 30 % à 70 % des irrigants utilisent une OAD (chiffre variable selon les filières, voir tableau 1), pour la majorité d’entre eux, les économies d'eau sont difficilement quantifiables.

Tableau 1. Synthèse des principaux résultats de l’enquête réalisée dans le cadre du projet CARG’EAU auprès de 64 exploitations. En caractère gras : les éléments marquants de l’enquête.

Filières enquêtées

Nombre d'exploitations concernées

Surfaces irriguées

Matériel d'irrigation

Outils de pilotage

Projets liés à l'irrigation

Changements de pratiques

Leviers envisagés

Arboriculture

7

100 % des surfaces (hors Bretagne, 70 %).

70 % goutte à goutte.

Micro asperseur et asperseur rotatif.

70 % avec des sondes tensiométriques ou capacitives.

Renouvellement de matériel.

Recours à OAD (dendromètre).

Cultures moins gourmandes en eau en région Provence- Alpes-côte d'Azur surtout (amandiers, grenadiers par exemple, grandes cultures au lieu des vergers).

OAD** et irrigation localisée.

OAD** sur irrigation.

Viticulture

3

Irrigation selon les cahiers des charges (interdit pour l'AOC en Alsace).

Goutte à goutte de surface principalement

33 % avec des sondes capacitives.

Absence.

Maintien de l'humidité par l'enherbement.

Porte greffe et cépages plus résistants.

Travail sur l'écimage (ombrière).

Maraîchage

8

87 % des exploitations.

63 % de goutte à goutte de surface.

Micro asperseur et canon enrouleur pour légumes de plein champ primeurs.

37 % avec des sondes tensiométriques ou capacitives.

Accéder à l'irrigation (50 %) ou développer le réseau.

37 % pas de changement.

Optimisation de l'irrigation OAD**.

Extension surfaces irrigables.

Choix variétal.

Aspersion sous plantes.

Écran d'ombrage sous serre/ombrière.

Plantes aromatiques à parfum et médicinales, petits fruits

4

75 % des exploitations.

100 % goutte à goutte de surface (sauf canon enrouleur sur lavandin)

33 % avec des sondes capacitives.

Développement irrigation, nouveau matériel.

Maintien de l'humidité par paillage.

Pas de changement.

Variétés plus résistantes.

Optimisation et développement de l'irrigation.

Grandes cultures et légumes plein champ

15

80 % des exploitations et 35 % de la SAU* irriguée (légumes surtout).

100 % canon enrouleur.

33 % avec des sondes ou OAD**.

Nouveau matériel (rampe).

46 % sans projet.

Augmentation de l'irrigation.

47 % pas de changement.

Couverture des sols.

Arrêt de certaines cultures (endives).

Diversification : valeur ajoutée.

OAD** pour l'irrigation.

Garndes cultures

15

66 % des exploitations 56 % de la SAU* irriguée.

50 % enrouleur.

Rampe et pivot.

40 % avec des sondes ou OAD**.

47 % création d'une nouvelle ressource en eau.

Nouveau matériel (pivot, rampe) pour 50 % des irrigants.

47 % changement d'assolement pour des cultures moins gourmandes en eau.

Choix de variétés moins précoces.

Variétés et cultures plus résistantes avec débouchés et productivités.

Diversification (valeur ajoutée).

Modification du travail du sol (couverture et réserve utile).

Polyculture élevage

13

43 % des exploitation n'ont pas d'accès à l'eau.

Surfaces irriguées faibles (31 % de la SAU* sur fourrages et maïs ensilage).

87 % canon enrouleur.

Absence (météo connectée).

Accompagnement technique et soutien.

Accès à l'irrigation.

Réduction de la surface en maïs pour des cultures plus résistantes (sorgho, tournesol, légumineuses).

Modification des cultures fourragères (dactyle au lieu de ray-grass).

Diversification et allongement des rotations.

Changement de pratique : sous couvert, limiter le surpâturage.

Nouvelles cultures adaptées.

38 % développer ou accéder à l'irrigation.

Diversification/valeur ajoutée.

* SAU : surface agricole utile ; ** OAD : outil d’aide à la décision.

La connaissance des coûts liés à l’irrigation par les irrigants eux-mêmes n’est pas complète. Les éléments qui les intéressent sont les coûts énergétiques et les frais d’entretien. En revanche, ils n’évaluent pas ou peu les coûts liés à leur temps de travail et à la main d’œuvre. L’amortissement des investissements en matériel est une variable généralement bien intégrée dans le coût global de l’irrigation sur une exploitation.

À noter que 20 % des exploitations enquêtées paient un forfait pour l’eau d’irrigation fournie par une gestion collective principalement dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur ou dans le Jura (association syndicale autorisée, syndicat ou société d’aménagement rural, coopérative d'utilisation de matériels agricole, droit de l’eau).

Bien que quinze des exploitations enquêtées ne disposent pas d'irrigation pour diverses raisons, une proportion importante envisage d'y accéder à l'avenir, par le biais de solutions telles que la création de retenues d'eau ou de forages.

Concernant l'adaptation au changement climatique, 72 % des exploitations ont déjà modifié leurs pratiques, en décalant les dates de semis, en réduisant le travail du sol et en introduisant des cultures plus résistantes à la sécheresse (tableau 1). L'amélioration de la gestion de l'eau est considérée comme une priorité, avec un accent sur le choix de variétés résistantes et l'amélioration de la qualité des sols.

Les agriculteurs expriment un besoin d'accompagnement pour optimiser leur gestion de l'eau et de l'irrigation, notamment en matière d'information sur les nouvelles technologies et les variétés adaptées, ainsi que sur les démarches réglementaires et financières pour la création de nouvelles ressources en eau.

Enfin, 77 % des exploitations enquêtées ont des projets en lien avec l'irrigation, allant de l'acquisition de nouveau matériel à l'optimisation des systèmes existants, dans le but de diversifier les productions et de sécuriser les rendements face aux conditions climatiques changeantes.

En savoir plus

Le rapport complet des diagnostics Carg’eau est en ligne sur le site des chambres d’agriculture Val de Loire : https://centre-valdeloire.chambres-agriculture.fr/ird/ird-projets-rd-innovation/projet-casdar-cargeau-2021-2023/

Au-delà des diagnostics réalisés, le projet CARG’EAU a abouti à d’autres actions :

  • des simulations climatiques sur l’évolution de la ressource en eau pour les sept régions partenaires ;
  • une base de données interrégionale et interfilières, sous forme d’espace collaboratif, capitalisant les références sur cinq volets (agronomie, rétention-stockage de l’eau dans les sols, infrastructures agro-écologiques et innovations techniques, matériel et pilotage de l’irrigation) ;
  • une offre d’accompagnement « faire les bons choix.

Six posters et six vidéos détaillant les principaux enjeux et résultats du projet sont consultables sur ce même site.

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Photo d’entête : Christophe Maître (INRAE)

Résumé

Le projet CARG’EAU, piloté par la Chambre régionale d’agriculture Centre-Val de Loire, a permis de capitaliser un grand nombre de références pour accompagner le plus grand nombre d’agriculteurs irrigants et non-irrigants, à la transition vers des systèmes économes en eau dans un contexte de changement climatique. Cet article nous livre les principaux résultats des enquêtes menées sur le sujet auprès de soixante-quatre exploitations.

Auteurs


Fabienne GUYOT

Affiliation : Chambre d’agriculture Alpes de Haute-Provence, 04000 Digne les Bains

Pays : France


Lauriane MOREL

Affiliation : Chambre d’agriculture Bouches-du-Rhône, 13626 Aix-en-Provence Cedex 1

Pays : France


Mireille BRUN

m.brun@paca.chambagri.fr

Affiliation : Chambre d’agriculture Provence-Alpes-Côte d'Azur, 13626 Aix-en-Provence Cedex 1

Pays : France


Benoit LOUCHARD

Affiliation : Chambre agriculture du Loiret, 3 avenue des droits de l'Homme 45921 Orléans Cedex 9

Pays : France


Rachel L'HELGOUALC'H

Affiliation : Chambre agriculture du Loiret, 3 avenue des droits de l'Homme 45921 Orléans Cedex 9

Pays : France

Pièces jointes

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