Prendre soin de l’eau à Venecia (Cundinamarca, Colombie), une lutte pour la vie
Au cœur des Andes colombiennes, la gestion de l’eau par la communauté paysanne de Venecia révèle l’importance cruciale de stratégies locales pour la préservation de cette ressource vitale. Face aux menaces croissantes d’appropriation et de raréfaction, l’exemple de la zone de réserve paysanne souligne la nécessité de reconnaître et de soutenir les pratiques territoriales d’autonomie et de soin collectif de l’eau. Cette étude met en lumière la capacité d’agir des communautés, les valeurs qu’elles défendent et les enjeux de justice sociale qui interpellent les politiques publiques en matière de gestion durable de l’eau.
Introduction
À une époque où la demande en eau grandit et où la variabilité de la répartition de la ressource s’accroit (ONU, 2024)
Un páramo est un biome néotropical d’altitude (entre 3 000 et 4 000 mètres) endémique de la chaine de montagne des Andes que l’on trouve en Colombie, au Venezuela, en Équateur et au Pérou. Les páramos sont considérés comme des unités écologiques de grande importance pour la régulation des ressources hydriques. En effet, ils retiennent de grands volumes d’eau grâce à la faible densité et haute porosité de leur sol et la végétation qu’ils abritent joue un rôle d’éponge.
Le páramo qui fait l’objet de mon analyse, le Páramo Sumapaz donc, est le plus vaste du monde et est considéré comme la deuxième source d’eau du pays (Daza Torres et al., 2014). Ce statut lui attire de nombreuses convoitises : il est notamment envisagé de l’exploiter comme potentielle ressource en eau pour la métropole de Bogota, située à une centaine de kilomètres. En effet, l’expansion urbaine galopante de Bogota entraîne des difficultés d’approvisionnement en eau, et le Páramo Sumapaz pourrait répondre aux besoins d’une population grandissante. Aujourd’hui, la ville est alimentée en eau à 80 % par le Páramo Chingaza (Celis, 2019), mais le système d’approvisionnement s’épuise peu à peu, comme en témoigne les rationnements que la capitale subit depuis le 11 avril 2024
Ainsi, pour des raisons tant écologiques (régulation hydrique et réserve pour la faune et la flore) que de sécurité d’approvisionnement en eau, la protection du Páramo Sumapaz fait consensus (Celis, 2019; Daza Torres et al., 2014). Parmi les activités souvent évoquées comme menaçantes pour cet écosystème fragile se trouvent les activités agricoles. En effet, l’expansion des terres agricoles
Mais le Páramo Sumapaz n’est pas qu’un écosystème. C’est un lieu de vie pour de nombreuses communautés paysannes qui luttent historiquement pour le droit à la terre qu’ils et elles travaillent. Si la réforme agraire était la promesse d’une répartition plus équitable des propriétés et une amélioration de vie des paysans et paysannes, sa mise en place a été lente et laborieuse (encadré 1). À cette lutte s’ajoutent des années de conflits armés dont les paysans et paysannes du Sumapaz ont souffert, pris dans les combats entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et le gouvernement. Dans ce contexte, la répartition des ressources en eau peut faire peser une injustice supplémentaire sur les paysans et paysannes. Nayive Gutierrez Romero, membre fondatrice d’Agua Campesina, association paysanne qui administre le territoire de Venecia, m’expliquait que les paysans ne sont pas reconnus comme protecteurs de l’environnement, mais sont plutôt vu comme una plaga
En effet, les communautés paysannes du Sumapaz, historiquement organisées, se sont mobilisées pour la protection du Paramo Sumapaz et de l’eau. Notamment, trois municipalités (Sumapaz, Cabrera et Venecia – Parte Alta) qui comprennent toutes une aire du Páramo Sumapaz, se sont constituées en trois zones de réserve paysanne (ZRC) (encadré 1) alliant protection de l’environnement et vie digne pour les paysan et paysannes. La communauté de Venecia – Parte Alta
Une zone de réserve paysanne (Zona de Reserva Campesina, ZRC) est un dispositif d’aménagement du territoire en Colombie, définie par l’article 1 de la loi 160 de 1994, et constitue un des outils de mise en place de la réforme agraire. Celle-ci, définie par la loi 135 de 1961, avait pour but de corriger la répartition très inégale de la terre en Colombie. Cette réforme peine, historiquement, à se traduire dans les faits. Les ZRC ont reçu une nouvelle attention dans le cadre des discussions pour les accords de paix de 2016, la mise en place effective de la réforme agraire étant un point central de discussion entre les deux parties, le Gouvernement national colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Elles ont pour mission d’assurer une répartition plus équitable des terres, d’améliorer les conditions de vie des paysans et de protéger l’environnement naturel.
Cet article explore la relation de soin à l’eau par la communauté de Venecia – Parte Alta en trois temps. Il montre d’abord le souci de l’eau révélé par l’expérience du manque d’eau, c’est-à-dire le lien entre la menace de diminution et la considération éthique. Il explore ensuite la manière dont la communauté prend effectivement soin de l’eau, en particulier à travers la protection du bosque andino
Méthodologie
Dans le cadre de ma recherche doctorale, j’ai mené une ethnographie au sein de la communauté de Venecia – Parte Alta. J’ai privilégié une approche phénoménologique, m’intéressant à l’expérience vécue de la communauté. Dans le but d’être le plus fidèle à cette expérience, la méthodologie, inspirée de l’ethnographie critique qui a pour intérêts premiers la justice sociale, l’analyse critique et les exigences éthiques du travail de terrain (Madison, 2011), a été construite en accord avec la communauté.
Mon premier séjour de terrain entre janvier et mars 2024 a été un séjour d’immersion. Au cours de ces trois mois, j’ai présenté à la communauté mon projet de thèse ainsi que le projet ERC – PREFER
Les deux autres séjours de terrain, respectivement de six et sept semaines, ont été consacrés :
- à la réalisation de trois entretiens avec cinq membres de l’équipe de direction de l’association Agua Campesina, permettant une compréhension profonde du contexte historique, politique et institutionnel dans lequel s’insère la ZRC ainsi qu’une vue d’ensemble sur les enjeux auxquels le territoire fait face ;
- à la co-construction d’histoire de vie avec vingt femmes de la communauté. La première étape de ce processus consistait en un long entretien non directif au cours duquel chacune d’elle était invitée à me raconter sa vie selon les évènements qu’elle jugeait marquant. Une fois l’entretien retranscris, chaque histoire a été révisée avec chaque participante afin que l’histoire corresponde à ce que celle-ci souhaitait raconter. Cette méthode inspirée du champ des narrative inquiries (Clandinin et Caine, 2013) permet de comprendre la manière le sens donné au déroulement de leur vie, ou s’entremêlent descriptions, analyses causales et jugements de valeurs.
L’expérience du manque et souci de l’eau
La sécheresse de 2024
Au début de l’année 2024, la communauté de Venecia a expérimenté sur son territoire une longue sécheresse. Cette sécheresse prend une place fondatrice dans mes recherches puisque ce n’est pas un évènement qui m’a été raconté, mais un épisode qui a eu lieu pendant ma présence. Ainsi, durant un épisode El Niño
- matérielle : pour abreuver le bétail et irriguer les cultures, dont dépendent les membres de la communauté pour leur survie économique ;
- écologique : pour alimenter les ruisseaux et la végétation tropicale ;
- identitaire : certains paysans et paysannes ont exprimé se sentir représentés par l’eau et par le fleuve du Sumapaz ;
- affective : des incendies se sont déclenchés pendant la sécheresse, brûlant des frailejones
11 en amont du Páramo, désolant les membres de la communauté.
Si ces catégories permettent de montrer l’étendue du champ d’importance de l’eau, elles ne sont en aucun cas fixes et étanches. Au contraire, elles s’entremêlent et se superposent, faisant de l’eau un élément holistique, le tissu de la vie. Cette appréciation de l’eau comme support d’existence, Don Silfredo, un des membres de la communauté, l’exprime ainsi : « Sans l’eau, rien n’existe ».
À mesure que les semaines passaient sans qu’il ne pleuve, l’inquiétude grandissait de manière palpable. Accompagner la communauté dans cet épisode m’a permis de comprendre
L’expérience sensible du manque d’eau
L’expérience difficile du manque d’eau ne concerne pas uniquement les épisodes de sécheresse sur le territoire, mais également les cas de déplacements vers des terres où le climat est sec. Ainsi, au cours des histoires que nous construisions avec les femmes de Venecia, se sont dessinées des formes de relations sensibles et incorporées à l’eau. À titre d’exemple, Doña Yolanda et sa fille Karol me racontent comment, lors de leur voyage au Mexique quelques années plus tôt, l’absence d’eau a été un élément particulièrement marquant. À ma question sur ce qui lui avait manqué pendant son voyage, Karol répondait :
« Ce qui m’a le plus manqué, c’était ma famille. Et à part la famille, l’eau. L’eau dans tous les sens du terme. Il y avait peu d’eau pour boire. On ne pouvait pas non plus sentir que l’eau tombait. Par exemple, si on marchait dans un pré, on ne pouvait pas sentir que le pâturage était humide, jamais. Des fois, on râle parce qu’il pleut, mais c’est un privilège. »
Doña Yolanda, quant à elle, s’interrompt au milieu de son récit :
« Ce qui était difficile dans tout ça, c’est que c’était très sec. Il n’y a pas d’eau ! Je crois que pour nous toutes qui sommes allés là-bas, ça a été très difficile. »
Cette expérience sensible du manque montre que la valeur de l’eau n’est pas uniquement matérielle pour la communauté. Elle ne répond pas aux caractéristiques du statut d’objet et c’est en ce sens bien plus qu’une ressource à gérer. Dans cette manière d’être au monde, l’expérience du manque d’eau n’est pas une absence froide, rationnelle ou désincarné, mais la menace de l’amenuisement de la vie.
Souci de l’eau et processus de soin
Le soin
La première phase dans le processus de care est donc celui du souci de, c’est-à-dire la constatation de l’existence d’un besoin (Zielinski, 2010). L’expérience de la sécheresse à Venecia révèle le souci de l’eau de la communauté, la constatation de sa nécessaire protection, dont l’abondance est menacée par l’intensification des sécheresses et les logiques d’accaparement associées aux sources des disputes présentées en introduction. Les défis propres au XXIe siècle font du soin à l’eau une nécessité plus grande encore.
Pour Tronto, ces phases ne sont pas forcément des étapes qui se succèdent. Ceci se confirme à Venecia où elles coexistent simultanément et sont parfois confondues. La prise en charge y est instantanée puisque l’État est perçu comme totalement absent. La communauté prend donc en charge les besoins de son territoire depuis qu’il est habité de manière autonome.
Prendre soin de l’eau
Protéger la forêt pour protéger l’eau
« Ici, on enseigne ceci : on ne vit pas seulement ici, on prend soin et on conserve. Surtout l’eau. C’est important de protéger l’eau. L’eau des villes, d’où elle sort ? Ici, nous protégeons beaucoup l’eau. Par exemple, les arbres doivent rester là où passent les ruisseaux. Au contraire, s’il n’y en a pas, il faut en planter. Les arbres protègent l’eau. S’il n’y a pas d’arbres, [la terre] s’assèche. »
Doña Elsa, une ancienne professeure de l’école primaire exprime un lien couramment fait par l’ensemble de la communauté de Venecia entre la protection de la forêt et la protection de l’eau
Gestion et partage de l’eau
Le soin à l’eau se décline également dans une gestion que les paysans et paysannes souhaitent juste et modérée.
Au niveau communautaire, plusieurs initiatives ont vu le jour afin de mieux répartir l’eau entre les différentes familles sans affecter le débit des rivières : une cartographie des nombreux petits ruisseaux qui sillonnent la montagne est en cours afin que de nouvelles construction comme des maisons ou des chemins n’affectent pas l’écoulement naturel de l’eau ; un projet d’aqueduc communautaire est en réflexion afin de répartir l’eau équitablement entre l’amont et l’aval ; une collaboration avec la Pontificia Universidad Javeriana est en cours pour évaluer avec précision les besoins en eau de chaque famille.
Au niveau individuel, de nombreuses familles possèdent des systèmes de récupération d’eau de pluie et sont particulièrement économes lorsque les pluies se font moins fréquentes. En mars 2024, alors que l’absence de pluie avait asséché les rivières, les familles transportaient de l’eau à leurs voisins à dos de mule pour leur consommation.
Réaliser le soin de l’eau
Transposé dans le cadre théorique de Tronto, la protection de la forêt, la répartition juste et l’usage modéré de l’eau sont autant de manières de réaliser le soin. L’exercice du soin pourrait être interprété comme une décision étroitement logique et rationnelle, cependant, Annemarie Mol (2008), montre qu’une logique du soin s’oppose diamétralement à une logique du choix. Pour elle, la rhétorique de la logique du choix dont l’autonomie est au centre, est un euphémisme pour justifier des pratiques sociales négligentes, puisque la responsabilité est alors rejetée sur l’autre (Biehl, 2012). Le poids moral dans la logique du choix porte alors sur une décision faite en accord avec une règle préétablie, et désengage par là-même du soin à l’autre. Dans la logique du soin, le poids moral se situe dans l’action-même de prendre soin. Les valeurs s’entremêlent aux actions ; prendre soin est une activité morale en elle-même (Mol, 2008). On peut donc comprendre la réalisation du soin à l’eau comme une action porteuse d’une charge morale, un engagement à soulager le besoin de l’autre.
Ces cadres théoriques ont été pensés pour expliquer des relations entre personnes humaines et non envers des éléments de l’environnement naturel. Cependant, le rapport à l’eau à Venecia, mais aussi plus largement en Colombie

Photo 1. « Nous sommes tous de l’eau ». Peinture murale dans la zone de réserve paysanne de Venecia.
Injustices, obstacles à la prise de soin
Protéger la forêt représente cependant un effort immense pour la communauté qui vit majoritairement de la culture de la mûre. En effet, celle-ci se voit imposer des prix bas et non fixes sur lesquels ils et elles n’ont aucun contrôle : « Ici, ils nous payent si peu. Et ils nous payent comme ils veulent ! »
Nayive me dit souvent que la communauté est productrice d’eau parce qu’elle protège la forêt qui la produit. Lors d’un long entretien, celle-ci m’expliquait en détail l’effort que représente la réalisation de ce soin pour la communauté :
« Les gens de la ville, ils ouvrent le robinet et il y a de l’eau qui coule, alors c’est facile pour eux de juger ceux qui sont dans les montagnes. […] Mais qui va les nourrir s’ils ne vendent pas la caisse de mure ? Qui va leur donner des courses s’ils ne vendent pas leurs tomates ? Alors, quand une famille décide de ne pas travailler une terre, pour que ce ne soit pas un pâturage ou une culture, elle y met de son capital. »
Cette situation n’est pas propre à Venecia, l’aspect financier et l’aspect relationnel du soin entre souvent en extrême tension dans des contextes où les ressources économiques sont faibles (Biehl, 2012). Cette situation conduit les paysans et paysannes à réclamer un « droit à prendre soin », pour reprendre les mots de Fernando, un membre fondateur de l’association Agua Campesina. En d’autres termes, la communauté demande l’accès à des conditions minimum de vie digne leur permettant de compléter le processus de soin à l’eau.
Pointer du doigts les pratiques paysannes comme destructrices de l’environnement alors même que la communauté lutte pour pouvoir prendre soin de l’eau dans un contexte qui les pousse dans le sens opposé est légitimement vécu comme profondément injuste. En effet, je n’ai pas l’espace de développer ici les multiples injustices subies par la communauté, faisant écho à la stigmatisation du monde paysan en Colombie (Matijasevic Arcila et Ruiz Silva, 2012) perçues comme un acharnement où les problèmes sociaux et environnementaux sont « toujours la faute du paysan »
Conclusion
J’ai présenté dans cet article le soin de l’eau à Venecia en utilisant le cadre théorique de Tronto. D’abord, nous avons vu le souci de l’eau exprimée par la communauté de Venecia – Parte Alta en lien avec les menaces causées par la sècheresse du début d’année 2024 ; ensuite, les modes de la prise de soin en acte par la communauté (conservation de la forêt, gestion juste et économe de l’eau) ainsi que les difficultés perçues par la communauté comme obstacles à la prise de soin (difficultés matérielles et économiques ; injustices et marginalisation). Comprendre le soin de l’eau à Venecia comme un processus permet de nous dégager du préjugé assignant les paysans et paysannes à des communautés destructrices de la nature. S’intéresser au rapport à l’eau de la communauté permet également de comprendre l’eau comme un élément qui dépasse largement la définition étroite d’une ressource comme capital matériel. Enfin, cette analyse nous invite à repenser une écologie politique où les injustices ne sont pas uniquement des points de vigilances à intégrer dans les mesures, mais bien destructrices de l’environnement en elles-mêmes.
Vouloir protéger la ressource en eau sans interroger les tissus de relations et de pouvoirs sur les territoires est aussi vain que tristement habituel. Trop souvent, les communautés paysannes sont exclues des processus de protection, voir jugées illégitimes à prendre soin du territoire (Lugo et Cairo, 2023) et l’eau est considérée comme une ressource dénuée de vie, de relations et d’histoires. L’espèce humaine est soit destructrice soit conservatrice d’une nature qui n’existe qu’en dehors d’elle (Descola, 2015). Or, la communauté de Venecia nous prouve que l’eau n’est pas une ressource isolée, elle est connectée aux communautés humaines, aux plantes et aux animaux, qui peuvent entretenir des relations qui ne relèvent pas de la destruction mais plutôt du soin. Elle nous invite à reconsidérer l’idéologie consensuelle de la conservation, et, surtout, de mettre plus profondément en question le rôle que jouent les structures de pouvoir productrices d’injustices dans la manière dont nous prenons soin de l’eau.
« Ce que j’aime ici ? Le vert, l’arbre, la fleur, le prés. Marcher et voir tout ça. Savoir que j’ai tout parce qu’il y a de l’eau. Ici, où que tu ailles, il y a de l’eau. », Silvia.
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Photo d’entête : juan rojas
Notes
- 1. Organisation des Nations-Unies.
- 2. J’utilise ici le terme dispute, au sens de rivalité pour l’obtention ou la conservation d’une même chose, plutôt que conflit qui pourrait évoquer un conflit ouvert et violent.
- 3. Voir le site de la ville de Bogota : https://bogota.gov.co/mi-ciudad/habitat/racionamiento-de-agua-bogota-zonas-y-horarios-restriccion-abril-2024
- 4. Traduction de l’espagnol des termes expansión de la frontera agricola.
- 5. Fléau, plaie.
- 6. La communauté de Venecia – Parte Alta désigne les familles habitant au sein de la zone de réserve paysanne (ZRC). Venecia étant une municipalité historiquement divisée entre une « partie basse » plus urbanisée au climat plus chaud et plus sec et une « partie haute », rural, au climat froid et humide. C’est la partie haute, parte alta, donc, qui a été constitué en ZRC.
- 7. Voir l'article 1 de la loi 160 de 1994, Función Pública : https://www.funcionpublica.gov.co/eva/gestornormativo/norma.php?i=66789
- 8. Forêt humide des Andes de haute altitude.
- 9. PRoxiEs For Existential Risk : le projet s’intéresse aux valeurs des communautés humaines dont la manière d’être au monde est menacée.
- 10. Phénomène climatique cyclique mondial qui entraîne des épisodes de sécheresse en Colombie.
- 11. Plante emblématique et endémique des páramos, connus pour leur croissance très lente et leur rôle dans la protection de l’eau.
- 12. J’utilise ici le concept de compréhension dans son opposition au concept d’explication. L’un renvoyant au partage d’une expérience, l’autre à une analyse causale et rationnelle.
- 13. J’utilise le concept de soin comme traduction depuis l’anglais du concept de care.
- 14. Juan Sebastian Velez, dans ses travaux de thèse visant à reconstruire l’histoire de Venecia, notait des pratiques visant à protéger l’eau et la forêt depuis les années 1990.
- 15. Voir les accords communautaires pour la conservation menés et décrits par Nayive Gutierez Romero (2025) dans sa thèse (Acuerdos campesinos para la gestión ambiental y la conservación de los ecosistemas de la Zona de Reserva Campesina de Venecia Parte Alta parte, como aporte al fortalecimiento del modelo de Gobernanza comunitaria) et le travail d’Alba Gimeno avec l’organisation non gouvernementale.
- 16. Certaines analyses colombiennes ont montré le lien qui unit les communautés humaines et l’eau. Pour ne citer que deux exemples, voir l’œuvre de Fals Borda, notamment Historia doble de la Costa, où le célèbre sociologue colombien décrit le mode de vie dual, entre eau et terre, dans la région de Cordoba ; voir également la cosmovision des Kogis, population autochtone de la Sierra Nevada, au sein de laquelle l’eau tient une place primordiale (Fals Borda, 2002).
- 17. Intervention d’une membre de la communauté durant une réunion communautaire extrait de mon carnet de terrain.
- 18. Extrait de l’histoire coconstruite avec Nancy.
- 19. Extrait de l’histoire coconstruite avec Doña Yolanda.
Références
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Résumé
Située dans les Andes colombiennes en aval du Páramo Sumapaz, jouissant d’un climat tropical d’altitude et d’un environnement perçu comme peu anthropisé, la zone de réserve paysanne se construit en interrelation avec un territoire humide. Si l’eau constitue une richesse écologique et symbolique pour la communauté, elle est aussi le lieu de disputes environnementales et d’accaparement de la ressource en eau dans un contexte de marginalisation historique du monde paysan. En ce sens, l’eau, élément central de la vie paysanne sur le territoire de Venecia, est menacée de raréfaction. Face à cette menace, la communauté de Venecia mobilise une éthique du soin à l’eau et lutte pour une gestion autonome, juste et soutenable, conditions nécessaires à la conservation de celle-ci. L’analyse montre le processus de soin en réponse à la menace de diminution de l’eau et les obstacles rencontrés par la communauté pour compléter ce processus.
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